Sommaire
Introduction
Xochipelli: l’Extase des Enthéogènes
Les Dominicains à l’Assaut du Shamanisme Mexicain
Le Renouveau Enthéogénique
Semences Enthéogéniques d’Ipomoea tricolor
Semences Enthéogéniques de Turbina corymbosa
Les Belles de Jour de la Déesse-Mère
Les Fungi Epibiotiques des Convolvulacées: une Synergie Enthéogénique
Les Alcaloïdes dans la Famille des Convolvulacées
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Introduction
Au tout début du 13ème siècle, alors que les Aztèques erraient, encore, au Mexique, en quête d’une nouvelle terre d’accueil, les Peuples d’Europa commençaient à s’éveiller de leur torpeur et de leur envoûtement monothéistes. En effet, les Troubadours et les Troubadouresses profitèrent, au début du second millénaire, du cycle normal, non anthropique, de Réchauffement Biosphérique (entre l’an 950 et l’an 1300) pour oeuvrer fertilement, dans la joie, la musique, la poésie et la sensualité, à réchauffer l’atmosphère humaine d’Europa qui, à l’exception de la Russie dissidente, avait déjà succombé, depuis de très nombreux siècles, aux tentations du paradis éternel de Yahvé/Yaldabaoth proposé, par les Eglises, en échange d’une vie de misères, de sévices, de faim, de servage, de guerres, de persécutions, de lobotomisations – et, surtout, de collusions victimes-perpétrateurs.
A very good deal, indeed. Le paradis éternel, au ciel de Jésus, en échange de l’esclavage sur Terre: c’est même soldé!
Les Compagnies et Guildes de Troubadours, et de Troubadouresses, conférèrent leur animation au renouveau Païen d’Europa: le pied de nez aux ecclésiastiques; les femmes à la guitare; des langues d’Oc peu doctes et dociles; des langues bien pendues et des langues léchantes… de yonis et de lingams; l’Amour courtois parce qu’érotique, sensuel et charnel…
… car l’Amour Courtois n’a de cesse que de mélanger les pinceaux, toutes couleurs confondues – en mode traditionnel dyadique ying-yang, cependant – à la mode et passion des Trouvères, les précurseurs des Romantiques en palabres chantées, musiquées… et incarnées dans la chair palpitante.
L’Eglise Catholique, et Cataclysmique, prit alors très peur et, en 1216, initia la création de la Secte des Dominicains – sous l’égide du Castillan Domingo Nuñez de Guzman. Les Dominicains furent mis en charge de l’Inquisition, à la suite du quatrième Concile de Latran, en 1215, qui lança – et balança à grandes envolées de crucifix – des anathèmes, des excommunions, des exclusions… à la bonne franquette, en veux-tu, en voilà! Ce qui n’empêcha pas l’espiègle Wolfram von Eschenbach – un émissaire de la Sagesse de Gaïa – de publier son Parzival, vers 1215/1220: l’ouvrage Païen et Gaïen de l’ultime outrage.
C’est ainsi que j’ai abandonné, depuis une douzaine d’années, mon prénom de malédictions catholiques, inspiré de cette secte génocidaire, pour adopter celui de Xochipelli – “Xochitl” signifiant Fleur en Nahuatl.
Dans le cas de Xochipelli, et de tout ce qu’il symbolise et incarne, les “fleurs” signifient, en réalité, les substances enthéogéniques – semences, lianes, fleurs, cactus, champignons… – qui permettent aux shamans de communiquer avec l’autre monde réel, celui du Nagual, et, en fait, si affinités telluriques, de communiquer, directement, avec la Déesse-Mère, avec la Terre-Mère – ou bien avec ses Dakinis.
Les Dominicains débarquèrent au Mexique en 1525 – environ, un siècle après l’érection, près du volcan Popocatepetl, de la célèbre statue du non moins célèbre Xochipelli – et ce fut le début de l’Inquisition: à savoir, le début du génocide systématique des Peuples de Méso-Amérique, la destruction de leurs cultures, la crémation de tous leurs codex et manuscrits et, bien sûr, l’interdiction de toutes les pratiques enthéogéniques shamaniques sous peine de mort sur les bûchers… au nom de Jésus, le dieu d’amour.
Un poème de Chalco a survécu, dans la région de Tlalmanalco, et du volcan Popocatepetl, où la statue de Xochipelli a été découverte… qui en inspira, peut-être, la sculpture:
Xochin papalotl tepanahuia: le papillon fleuri vole et virevolte
Ma in tlachichina Aya toxochiu: puisse t-il aspirer du miel de nos fleurs
O tomac xochiu in!: en dansant dans nos bouquets!
Xochipelli: l’Extase des Enthéogènes
La statue de Xochipelli – ou Xochipilli – se trouve, aujourd’hui, au Musée National d’Anthropologie de Mexico. Elle présente la “guirlande magique” – pour emprunter une expression du Parzival de Wolfram von Eschenbach [30] – des principales substances enthéogéniques utilisées dans le shamanisme des Peuples Méso-Américains. Il s’agit des espèces suivantes: Turbina corymbosa/Ipomoea tricolor, Psilocybe aztecorum, Heimia salicifolia, Nicotiana rustica et Quararibea funebris. [7]
Psilocybe aztecorum [27] a été nommé, et identifié, par Roger Heim, en 1956, lors de l’une de ses expéditions enthéogéniques et mycologiques, en Oaxaca, en compagnie de Gordon Wasson. Ils découvrirent, tous deux, subséquemment, une vingtaine de nouvelles espèces Mexicaines de champignons Psilocybes.
En 1957, Roger Heim déclarait dans son essai “Notes préliminaires sur les Agarics hallucinogènes du Mexique” [28]: «Il n’est pas exclu que les champignons hallucinatoires Mexicains, dont nous avons réussi, pour trois espèces, au Muséum d’Histoire Naturelle de Paris, la culture vivante en milieu artificiel à partir des spores, [29] et obtenu la fructification au laboratoire, apportent bientôt leur concours à ces problèmes nouveaux posés par la médecine et la pharmacodynamie.
Mais ne pourrait-on souhaiter, également, dans l’époque de folie collective traversée actuellement par l’humanité, que quelque autre végétal soit bientôt découvert, qui nous puisse apporter le moyen de redonner aux hommes simplement la raison – qu’ils semblent avoir perdue».
“Une époque de folie collective traversée actuellement par l’humanité”: que dirait, aujourd’hui, Roger Heim, l’humaniste, confronté à la fausse pandémie du Coque/Vide 19 et à la dictature sanitaire orchestrée par un petit gang de criminels psychopathes et génocideurs des Peuples de la Terre?
Gordon Wasson, dans son ouvrage, de 1980, “The Wondrous Mushroom. Mycolatry in Mesoamerica”, consacra son troisième chapitre à l’analyse de cette très célèbre statue: “Xochipilli. Prince of Flowers: a new interpretation”. En voici quelques extraits:
«Au Muséum National d’Anthropologie de Mexico, se trouve une statue remarquable connue sous le nom de Xochipilli, “Le Prince des Fleurs”. Pour autant que je sache, ce n’est que dans la Méso-Amérique que le panthéon de l’Homme Ancien inclut une divinité dédiée exclusivement aux “fleurs”. Xochi vient du nahuatl “Xochitl” signifiant fleur; “pilli” signifie soit enfant, soit Prince, et rappelle notre usage ancien, en Anglais, du terme enfant pour qualifier un jeune de noble naissance – par exemple, Childe Harold de Byron – ainsi que l’usage de Infante en Espagnol
La statue, et ce que nous appelons son socle, furent excavés à Tlalmanalco, à proximité du volcan Popocatepetl, au milieu du 19ème siècle. Ce “socle” est en réalité partie intégrante de la statue, car c’est une reproduction miniature de la partie inférieure d’un temple Aztèque sur laquelle Xochipelli, en taille réelle, est assis. Au vu des éléments de style, on considère que la statue fut sculptée une génération environ avant l’arrivée des Conquistadores.
L’impression générale, conférée par ce Prince des Fleurs, est stupéfiante. L’inclination vers le ciel de la tête et des yeux, la bouche mi-ouverte et tendue, la mâchoire proéminente, les mains situées à différents niveaux, les jambes croisées avec les pieds presque totalement décollés du sol, la tension exprimée par la rétraction du gros orteil droit – tous ces traits provoquent la même impression… Ils sont loin de convier la joie paisible d’un passionné de fleurs. Car, alors, les yeux devraient être tournés vers le sol et il devrait émaner, de tout le personnage, un sentiment de quiétude.
Une des clés de l’énigme, concernant ce personnage, se trouve dans le masque porté par l’homme. On la découvre dans les orbites des yeux et, encore mieux, en dessous du menton. Dans les cultures Occidentales, les masques ont perdu toute leur importance: ils sont relégués aux jeux d’enfants ou aux divertissements – tels que les bals masqués et les festivités frivoles du Nouvel An. Mais dans l’Antiquité, ainsi que dans virtuellement toutes les autres cultures de la planète, le masque revêt une importance capitale. Il met en valeur le trait saillant de personnalité que le porteur représente – étant la personnification de ce trait. Dans cette statue de Xochipelli, le masque représente un dieu en pleine extase et il le représente avec un puissant génie. Voici un personnage qui ne voit pas, qui ne vit pas comme des mortels ordinaires peuvent voir et vivre: il peut percevoir directement avec les yeux de l’âme. Cet être n’est pas présent parmi nous, il voyage dans un monde lointain. Il est absorbé par “Temicxoch”, “le Rêve des Fleurs” – ainsi que les Nahuatls le qualifient pour décrire l’expérience grandiose induite par l’ingestion d’un enthéogène. Je ne peux rien trouver de comparable dans l’histoire longue et riche de l’art Européen: Xochipilli absorbé en Temicxoch.
L’extase est au coeur de ce personnage. Nous avons ici l’oeuvre d’un maître, une sculpture suprême d’un homme plongé dans une expérience non terrestre, l’effigie hiératique formelle de la Divinité de l’Extase, le Dieu des Fleurs (ainsi que les Aztèques le qualifièrent): le dieu de la jeunesse, de la lumière, de la danse, de la musique et des jeux, de la poésie et de l’art; l’Enfant-Dieu, le dieu du soleil levant, de l’été et de la chaleur, des fleurs et des papillons, de “l’Arbre en Fleur” (Xochicuahitl ou Arbol Florido) que les poètes Nahuatls évoquent fréquemment, le dieu des champignons enivrants (las Flores que embriagan), le dieu des plantes miraculeuses qui transportent vers le Paradis céleste.» Traduction de Xochi.
Des Fleurs enthéogéniques qui possèdent la capacité de faire imploser la Théologie de l’Annihilation et qui transportent, en fait, les animaux humains, vers le Paradis Terrestre, le Paradis de Gaïa, le monde du Nahual – celui dont les monothéistes ont condamné et persécuté l’accès depuis quelques millénaires… tel que le monothéiste génocidaire Espagnol, Hernando Ruiz de Alarcón.
Les Dominicains à l’Assaut du Shamanisme Mexicain
Un siècle après l’arrivée des Dominicains au Mexique, le missionnaire Hernando Ruiz de Alarcón – auto-proclamé inquisiteur et persécuteur des Peuples Indigènes Mexicains – publia, en 1629, son “Tratado de las supersticiones y costumbres gentilicias que hoy viven entre los indios naturales de esta Nueva España”. Son objectif était de détruire le shamanisme enthéogénique des Peuples Aztèques, Mazatèques, Zapotèques, Mixtèques, Chichimèques, Tépanèques, Chinantèques. Il consacra tout un chapitre, de son premier tome, à décrire les trois plantes psychoactives les plus utilisées dans les rituels shamaniques du Mexique – à savoir le Peyotl, l’Ololiuhqui et le Tabac.
Dans le passage suivant, rédigé en vieux Castillan, Hernando Ruiz de Alarcón accuse les Indigènes de communiquer avec le Diable, en personne, de par la perte de leur jugement induite par la consommation d’une boisson à base d’Ololiuhqui – à savoir l’espèce Turbina corymbosa.
«El ololuhqui es vn genero de semilla como lantejas, que la produce vn genero de yedra desta tierra, y veuida esta semilla priua del juicio, porque es muy vehemente; y por este medio comunican al demonio, porque les suele hablar quando estan priuados del juicio con la dicha heuida, y engañarlos con differentes apariensias, y ellos lo atribuyen a la deydad que dizen esta en la dicha semilla llamada ololiuhqui o cuexpalli que es vna mesma cosa». [18]
Dans le même chapitre, Hernando Ruiz de Alarcón précise que l’Ololiuhqui est, également, utilisé pour purger et pour soigner toutes formes de maladies – telle une panacée universelle.
Il évoque, également, le fait que cette boisson médicinale et psychoactive peut être consommée non pas par le malade directement mais par un guérisseur, appelé “Payni” (un terme issu de la racine Nahuatl “pai” signifiant boire une médecine) ou un “Tlachixqui” – signifiant devin, gardien et visionnaire en Nahuatl.
Durant la même période, en 1628/1630, fut publié l’ouvrage du médecin Espagnol, Francisco Hernandez (1517-1587), intitulé “Rerum medicarum Novae Hispaniae thesaurus”. Il y décrit cette même espèce enthéogénique dans le passage suivant:
«Il existe une plante, au Mexique, appelée plante-serpent, une plante grimpante avec des feuilles en forme de flèche – et c’est ainsi qu’elle est appelée, également, plante-flèche. Ses semences sont utilisées en médecine. Moulue et consommée avec du miel et du poivre Espagnol, elle élimine les douleurs et guérit toutes sortes de maladies, inflammations et ulcères. Lorsque les prêtres des Indigènes souhaitent communiquer avec les esprits des défunts, ils ingèrent ces semences, afin d’induire une transe et perçoivent, ainsi, des milliers de figures sataniques et d’hallucinations à l’entour».
José de Acosta, dans son ouvrage de 1590, intitulé “Historia natural y moral de las Indias”, évoque l’utilisation d’un baume/boisson, par les shamans Indigènes – afin de «se transformer en sorciers et de communiquer avec le Diable», en personne. Ce baume – dénommé “Teotlacualli” signifiant “nourriture divine” – était confectionné à partir de cendres d’insectes et d’animaux vénimeux (araignées, scorpions, geckos, vipères) mélangées avec beaucoup de tabac (Nicotiana rustica) et de semences moulues d’Ololiuhqui. [19]
Selon Albert Hofmann: «Si l’on se réfère aux nombreux antiques écrivains cités par la monographie de Schultes, l’ololiuqui doit avoir été utilisé extensivement dans les vallées Mexicaines durant l’époque pré-hispanique. Il semble avoir été plus important en divinité que le peyotl ou le teonanácatl. Cependant, son usage médicinal était également très extensif. L’ololiuqui était prescrit pour soigner les flatulences, les maladies vénériennes, pour soulager les douleurs et pour éliminer les tumeurs. L’ololiuqui était considéré comme possédant une divinité en propre qui opérait des miracles lorsque conciliée adéquatement… L’ololiuqui était utilisé par les anciens Aztèques non seulement comme une potion mais comme un ingrédient entrant dans la composition de baumes magiques». In “Teonanácatl and Ololiuqui, two ancient magic drugs of Mexico”. 1971. [20]
Albert Hofmann fait référence, dans ce passage, à la monographie publiée, en 1941, par Richard Evans Schultes et intitulée “A Contribution to Our Knowledge of Rivea corymbosa: The Narcotic Ololiuqui of the Aztecs”. [20]
C’est, également, en 1941, en janvier, à Princeton – alors que Richard Evans Schultes explorait les voies des pratiques shamaniques antiques qui allaient réintroduire l’animisme dans le monde moderne – que le grand génie Wilhelm Reich (qui fut assassiné, en 1957, dans les prisons US pour sa dissidence) rencontra Einstein – le plus grand farceur quantique devant l’Eternelle – afin de lui expliquer, pendant 5 heures, que tout l’univers est animé par une force vitale érotiquement chargée qui est appelée l’orgone.
Le Renouveau Enthéogénique
La seconde moitié du siècle passé fut une époque d’effervescence quant à la découverte des substances enthéogéniques utilisées, depuis des millénaires, par les Peuples de Méso-Amérique, en particulier au Mexique, et quant à la détermination de leurs principes actifs. Les grands pionniers, qui oeuvrèrent ensemble – et en profondes amitiés – afin de promouvoir ce renouveau enthéogénique, furent Richard Evans Schultes, Albert Hofmann, Gordon Wasson et Roger Heim.
Ils furent suivis, à partir des années 1965/1970, par une seconde génération de pionniers tels que Timothy Leary, Richard Alpert, Terence McKenna [14], Carlos Castaneda, Christian Ratsch, Davis Wade, Jeremy Narby [15]…
Le plus célèbre ethnobotaniste, de l’Université d’Harvard, est Richard Evans Schultes (1915-2001). Il est l’auteur, ou le co-auteur, de nombreux ouvrages dont: “Plants of the Gods: Their Sacred, Healing, and Hallucinogenic”, “Ethnobotany: Evolution of a Discipline”, “Vine of the Soul: Medicine Men, Their Plants and Rituals in the Colombian Amazonia”, “The Botany and Chemistry of Hallucinogens”, “The Healing Forest: Medicinal and Toxic Plants of the Northwest Amazonia ”.
Albert Hofmann (1906-2008) est connu comme étant le découvreur du LSD en 1943 – chez Sandoz. C’est au printemps 1958 qu’il publia le compte-rendu de ses recherches portant sur l’isolation et l’identification des principes actifs des champignons Psilocybes – à savoir la psilocybine (4-phosphoryloxy-N,N-dimethyltryptamine) et la psilocine (4-hydroxy-N,N-dimethyltryptamine) [17]. Il publia plusieurs ouvrages sur ses recherches avec le LSD: “Voyage acide : naissance du LSD”, “Les Plantes des Dieux” et “LSD mon enfant terrible”.
Gordon Wasson (1898-1986) fut banquier avant de devenir le père de l’ethnomycologie. En 1953, il fut le premier Occidental à être initié au Teonanacatl, le champignon sacré Psilocybe, par la guérisseuse Mazatèque Maria Sabina. Gordon Wasson, et son épouse Valentina, furent les auteurs, en 1967, de l’ouvrage “Soma. The Divine Mushroom of Immortality”. [10] Ils furent, également, les concepteurs de la “Thèse Wasson” – à savoir l’hypothèse du fondement enthéogénique de la religion. [11] [12] [13] Gordon Wasson est également l’auteur, en 1980, de l’ouvrage “The Wondrous Mushroom. Mycolatry in Mesoamerica” – qui fut fortement apprécié par Claude Lévy-Strauss, le fondateur de l’anthropologie structurale.
Roger Heim (1900-1979) fut l’un des pionniers de la mycologie et assuma les responsabilités, en France, de président de l’Académie Nationale des Sciences et de directeur du Muséum d’Histoire Naturelle. Il publia plusieurs ouvrages dont: “Les champignons toxiques et hallucinogènes du Mexique”, “Termites et Champignons”, “Les champignons toxiques et hallucinogènes”, “L’Angoisse de l’an 2000”. [8] [9]
En 1963, il rédigea l’introduction de la traduction de l’ouvrage de Rachel Carson “Le Printemps Silencieux”, le premier ouvrage à dénoncer l’emprise de la mafia de la chimie agricole et des pesticides. Il y écrivit: «On arrête les “gangsters”, on tire sur les auteurs des “hold-up”, on guillotine les assassins, on fusille les despotes – ou prétendus tels – mais qui mettra en prison les empoisonneurs publics instillant chaque jour les produits que la chimie de synthèse livre à leurs profits et à leurs imprudences?».
Roger Heim étudia les champignons hallucinogènes à partir de 1952. En compagnie de Gordon Wasson, ils découvrirent ensemble une vingtaine de nouvelles espèces de champignons hallucinogènes au Mexique. Il publia ses recherches – durant les deux dernières décennies de sa vie, de 1958 jusqu’en 1978 – dans les Annales du Muséum d’Histoire Naturelle.
Ce fut également un artiste aquarelliste brillant: ses aquarelles de champignons Psilocybes furent publiées dans les Annales du Muséum d’Histoire Naturelle et je les ai reproduites, sur mon site Liberterre, en compagnie de ses essais sur les Champignons hallucinogènes du Mexique, sur les Lycoperdons narcotiques des Mixtèques, etc. [16]
Semences Enthéogéniques d’Ipomoea tricolor
Ipomoea tricolor fut décrite, en 1794, par le botaniste Espagnol, Antonio José de Cavanilles, dans son ouvrage “Icones et Descriptiones Plantarum”. [6]
Les Aztèques dénommaient les semences de cette espèce “Tlitliltzin” – à savoir le terme, en Nahuatl, pour “noir” accompagné d’un suffixe révérenciel. Ces semences sont, également, connues sous le nom de “Badoh negro” – par exemple, chez les Zapotèques d’Oaxaca.
Christian Ratsch, dans son ouvrage, de 1998, intitulé “The Encyclopedia of Psychoactive Plants”, ainsi que Richard Evans Schultes dans son ouvrage, de 1977, intitulé “Hallucinogenic Plants”, ainsi que Richard Evans Schultes et Albert Hofmann, dans leur ouvrage, de 1992, intitulé “Plants of the Gods” – et co-rédigé avec Christian Ratsch – ont manifestement commis une erreur de détermination botanique en attribuant des propriétés psychoactives et visionnaires à Ipomoea violacea alors qu’il s’agissait, en fait, d’Ipomoea tricolor.
Cette erreur avait, auparavant, été commise par l’Université d’Ohio, en 1975, dans une étude intitulée “Extraction and Identification of Clavine and Lysergic Acid Alkaloids from Morning Glories” [34] et elle fut reprise, subséquemment, par la Revue Brésilienne scientifique, Revista Brasileira de Farmacognosia.
Selon les experts en phylogénétique, le genre Ipomoea comprend trois sous-genres: Ipomoea, Quamoclit et Eriospermum. Ipomoea violacea appartient au sous-genre Eriospermum tandis qu’Ipomoea tricolor appartient au sous-genre Quamoclit.
En fait, dans certains ouvrages, Ipomoea tricolor était considéré comme un synonyme d’Ipomoea violacea alors que les fleurs de cette dernière espèce, malgré la dénomination latine, sont blanches – et, exceptionnellement, de couleur mauve pâle – et ne contiennent aucune substance psychotropique ou psychomimétique.
Dans un essai de 1965, Der Marderosian a tenté de décrire les sources historiques de cette confusion botanique. [31]
D’ailleurs, en 1966, Albert Hofmann avait publié (dans l’ouvrage “Summa anthropologica en homenaje a Roberto J. Weitlaner”) les résultats de ses recherches en mentionnant l’appellation botanique correcte du Tlitliltzin: “The active principles of the seeds of Rivea corymbosa (Ololiuhqui, Badoh) and Ipomoea tricolor (Badoh negro)”.
Voici quelques-uns des alcaloïdes à base d’ergoline que l’on trouve dans Ipomoea tricolor: l’ergine (LSA), l’agroclavine, la chanoclavine, l’elymoclavine, l’ergocristine, l’ergotamine, l’ergométrine, l’ergosinine, la penniclavine, le dihydrolysegol, l’isolysergol, l’ergométrinine, l’ergostine et la noragroclavine.
Une étude de 2008, intitulée “Unauthorized Research on Cluster Headache”, a fait le point sur le traitement des migraines et de la céphalée trigéminale par le recours au LSD, au LSA et aux champignons psilocybes. [32]
Selon diverses analyses effectuées, le taux de LSA, dans les semences d’Ipomoea tricolor, peut varier de 0,035 à 0,075%. [33] Il semblerait que le taux d’alcaloïdes varie non seulement en fonction des écotypes mais, également, en fonction des variétés horticoles au sein de l’espèce. C’est ce qu’a découvert, par exemple, l’Université d’Ohio, dans l’étude sus-citée, en analysant diverses variétés telles que Heavenly Blue, Blue Star et Pearly Gates – cette dernière en contenant deux fois plus que les deux autres. [34]
En fonction du taux d’alcaloïdes, il est, généralement, estimé que les semences d’Ipomoea tricolor seraient de 5 à 10 fois plus puissantes que celles de Turbina corymbosa – et 5 fois moins puissantes que les semences d’une autre espèce de Convolvulacée enthéogénique, Argyreia nervosa, la Liane d’Argent.
Les alcaloïdes à base d’ergoline sont quasiment les mêmes chez Ipomoea tricolor et chez Turbina corymbosa (dans la plupart des écotypes) si ce n’est que le lysergol chez Turbina corymbosa est remplacé par l’ergométrine chez Ipomoea tricolor.
Dans leur ouvrage, de 1980, intitulé “The Botany and Chemistry of Hallucinogenes”, Richard Schultes et Albert Hofmann expliquent la différence entre le LSD et le LSA: «La légère différence de structure chimique entre les constituants de l’ololiuqui et le LSD est, néanmoins, très significative en termes d’activité hallucinogénique. Chez l’humain, la dose orale efficace est de 0,05 mg: ce composé est donc de 50 à 100 fois plus actif que le LSA – qui est actif en doses de 2 à 5 mg. De plus, il n’est pas qu’une différence quantitative en ce qui concerne les principes actifs d’Ipomoea violacea [en fait, d’Ipomoea tricolor – NDT] et Turbina corymbosa, d’une part, et le LSD, d’autre part. Il existe, également, une différence qualitative car le LSD constitue un hallucinogène très spécifique tandis que les effets psychiques du LSA, et ceux de la totalité des alcaloïdes de ces deux espèces, se caractérisent par une activité narcotique prononcée». Page 252.
En fait, l’activité du LSA se rapproche plus de celle de substances telles que la scopolamine et de l’ibogaline. [46]
Semences Enthéogéniques de Turbina corymbosa
En 1897, M. Urbina identifia l’espèce enthéogénique de Convolvulacée, utilisée par les Peuples de Méso-Amérique, et dénommée “Ololiuhqui”, comme étant Rivea corymbosa ou Turbina corymbosa. En 1936, l’anthropologue et ethnobotaniste Blasius Paul Reko (1877-1953) publia une monographie, “Magische Gifte, Rausch – und Betäubungsmittel der Neuen Welt”, décrivant les usages shamaniques de cette espèce. En 1938, Richard Evans Schultes, en collaboration avec Reko, confirmèrent, définitivement, après des dizaines d’années de débats, cette identification botanique. Richard Evans Schultes publia ces recherches dans une monographie, de 1941, intitulée “A Contribution to Our Knowledge of Rivea corymbosa: The Narcotic Ololiuqui of the Aztecs”. [20]
En effet, à cette époque, certains chercheurs pensaient, encore, à l’instar du botaniste William Safford, (1917) qu’Ololiuhqui appartenait au genre Datura de la Famille des Solanacées. [21]
C’est en août 1960 qu’Albert Hofmann identifia le principe actif, des semences de Turbina corymbosa et d’Ipomoea tricolor, à savoir l’ergine – un alcaloïde dérivé de l’ergoline – qui est connue, également, sous le nom de LSA, l’amide d’acide d-lysergique.
En 1959, il avait déjà reçu un premier lot de semences de ces espèces et les résultats des analyses furent à ce point encourageants que Gordon Wasson – avec l’aide de l’anthropologue Mexicain Roberto Weitlaner – lui envoya 12 kg de graines de Turbina corymbosa et 14 kg des graines d’Ipomoea tricolor.
Turbina corymbosa contient les alcaloïdes suivants: acide lysergique (LSD), ergine (LSA), acide lysergique α-hydroxy-éthyl-amide, ergonovine, agroclavine, elymoclavine, lysergol, chanoclavine. [43]
«Les amides de l’acide dextro-lysergique, et de l’acide dextro-isolysergique, sont étroitement corrélés à l’acide lysergique diéthylamide (LSD)… que nous avons produit synthétiquement et que nous avions étudié, pendant de nombreuses années, lors de nos travaux avec le LSD. D’un point de vue phyto-chimique, cette découverte fut non anticipée et particulièrement intéressante car les alcaloïdes d’acide lysergique – qui alors n’avaient été isolés que dans les champignons inférieurs du genre Claviceps – étaient maintenant découverts, pour la première fois, dans des plantes supérieures, à savoir dans la Famille des Convolvulacées». Albert Hofmann en 1963.
Albert Hofmann déclara que la découverte de dérivés l’acide lysergique diéthylamide, dans deux Belles de Jour (Turbina corymbosa et Ipomoea tricolor), avait clos son long cycle de recherches – tel un “cercle magique” :
«Grâce à mes recherches portant sur l’ololiuqui, mon travail, dans le domaine des substances hallucinogènes, boucla joliment la boucle. Cette oeuvre formait maintenant un cercle – un cercle magique, pourrait-on dire. Les études portant sur la production d’amides d’acide lysergique – de type ergonovine, un alcaloïde naturel de l’ergot – constituèrent le point de départ. Cela amena à la synthèse du LSD, l’acide lysergique diéthylamide. Le travail portant sur cette substance hallucinogène qu’est le LSD conduisit, ensuite, aux études sur les champignons hallucinogènes teonanacatl – à partir desquels furent isolés les principes actifs psilocybine et psilocine. L’intérêt suscité par cette substance magique Mexicaine, qu’est le teonanacatl, conduisit au travail portant sur une seconde substance magique Mexicaine, l’ololiuqui. Dans l’ololiuqui, des amides d’acide lysergique, dont l’ergonovine, furent de nouveau découverts comme constituant les substances hallucinogènes – et cela ferma le cercle magique».
Il est à noter que les qualités et les traditions psychoactives – et/ou enthéogéniques – rapportées, dans ce présent essai, eu égard aux espèces psychoactives et psychomimétiques de Convolvulacées ne concernent, presqu’exclusivement, que leurs semences. Il est bien évident que les mêmes alcaloïdes sont produits dans les feuilles de ces Convolvulacées de par la présence symbiotique de fungi de la Famille des Clavicipitacées, par exemple – et de par le fait que les animaux s’en intoxiquent, parfois, en les broutant. Cependant, ce sont principalement les semences qui sont utilisées dans les traditions enthéogéniques et les rituels magiques.
Attention: afin d’éviter que les semences des Ipomées et autres Convolvulacées – reconnues comme hallucinogéniques telle qu’Ipomoea tricolor – soient consommées par des animaux humains en quête d’expériences enthéogéniques, les négoces de semences enrobent leurs semences des produits fongicides les plus toxiques sur la planète – tel que le captane.
Les Belles de Jour de la Déesse-Mère
“Ololiuhqui” signifie, en Nahuatl, “chose ronde”. Le nom de l’espèce, en Nahuatl, est “Coaxihuitl” qui signifie “plante-serpent” ou “Coatl Xoxouhqui” qui signifie “serpent bleu-vert”. Elle est, encore, nommée “Cuexpaltzin”, “Lézard Sacré”, dans un rapport de procès d’Inquisition, en 1621, ainsi que dans l’ouvrage sus-cité de Hernando Ruiz de Alarcón.
Dans le Codex Magliabechiano (1528) se trouve, dans le folio 83, une représentation d’Ololiuhqui dans un champ, porté par deux serpents à sonnettes.
Elle est, en fait, nommée sous de multiples appellations dans les divers langages Nahuatl, Zapotèque, Tepehuan, Mayas, Mazatèque, Mixtèques, etc. Ainsi, les Mayas du Yucatan l’appellent “xtabentum” – qui signifie “la corde-joyau”.
Les Peuples Indigènes appelaient, en Espagnol, la plante “le manteau du ciel” et ses semences “les semences de la vierge” – parce qu’elles doivent être moulues par une jeune femme vierge afin de pourvoir les visions.
La dénomination “Semences de la Vierge” fait, également, référence à la Vierge Marie (une marque déposée, et une appellation contrôlée, par les sectes Catholiques de la religion Chrétienne) parce que les Peuples Méso-Américains durent occulter leur pratiques ancestrales, et multi-millénaires, d’utilisation de plantes et de champignons enthéogéniques en les affublant de terminologies issues du jargon monothéiste – afin de ne pas périr sur les buchers de l’Inquisition.
Ils appelaient, ainsi, par exemple, les champignons Psilocybe enthéogéniques, “los Niños Santos”.
Mais, surtout, ainsi que l’évoque Peter Furst, cette dénomination fait référence à la Vierge Marie en tant qu’ersatz de Déesse Mère parce que, selon cet ethnologue, le couple Ololiuhqui (Turbina corymbosa) et Tlitliltzin (Ipomoea tricolor) était intimement associé avec la Déesse de la Terre.
Dans un essai de 1970, Peter Furst avait, en effet, proposé que la célèbre peinture murale, provenant du complexe de Tepantitla à Teotihuacán, n’était pas une représentation de Tlaloc – la divinité mâle, de la pluie et de la guerre – mais bien plutôt une représentation d’une Déesse-Mère connue, subséquemment, comme Xochiquetzal chez les Aztèques, à savoir la Déesse de l’Amour, de la Beauté, de la Fertilité, des Fleurs et de la Végétation. Peter Furst nomma cette Déesse de la Terre et de la Fertilité la “Mère de l’Eau” – en s’inspirant des divinités Mères de l’Eau chez le Peuple Huichol.
En 1971, Esther Pasztory, une spécialiste de l’art précolombien, en arriva à des conclusions similaires, lors de la préparation de sa thèse doctorale, et considéra que la divinité du complexe mural de Tepantitla était très proche de la personnalité attribuée à Xochiquetzal. [22]
Cette réinterprétation fut, également, partagée par un autre spécialiste de l’art précolombien, Arthur G. Miller, dans son essai “The Mural Painting of Teotihuacan” (1974) ainsi que par une autre éminence des cultures Méso-Américaines précolombiennes, Doris Heyden (1905-2005), dans son essai “Pre-Columbian Architecture of Mesoamerica” (1977). En vérité, ce fut l’archéologue (et féministe avant l’heure) Eulalia Guzman (1890-1985) qui, la première, évoqua l’identité féminine de cette divinité – en l’identifiant avec la déesse de l’eau et de la fertilité, Chalchiuhtlicue.
Peter Furst, et les trois autres érudits de l’art précolombien, étaient tous d’accord sur le fait que la plante volubile – “l’arbre” – émergeant derrière et au-dessus de la coiffure de quetzal de la divinité n’est pas, uniquement, un symbole de végétation et de fertilité mais qu’il incarne différents niveaux de signification au-delà de l’histoire naturelle et de l’ethnobotanique.
Doris Heyden concevait cette plante volubile comme une représentation d’un arbre cosmique symbolisant l’inter-relation entre tous les éléments de la Nature et de la Vie. C’est ainsi que les shamans Huichol considèrent que le Tabac constitue “l’arbre des shamans” et que le Peyotl constitue “l’arbre de notre vie”. Dans la vision des shamans, de toute la planète, les arbres, les plantes volubiles, les buissons, les champignons, les cactus… sont conçus comme une échelle magique vers l’autre monde – le monde du Nagual.
Peter Furst – suite aux suggestions de Richard Evans Schultes – conçut que la plante volubile, de cette peinture murale de Tepantitla, constitue une représentation fidèle (dans son geste de croissance, ses boutons floraux et ses semences) d’une Belle de Jour – à savoir Turbina corymbosa ou bien, encore, Ipomoea tricolor. Dans sa vision, cette Convolvulacée volubile croit organiquement, tel un serpent, du corps de la Déesse-Mère. C’est cette thèse qu’il développa dans un essai subséquent, de 1972, intitulé “Morning Glory and Mother Goddess at Tepantitla, Teotihuacan: iconography and analogy in pre-Columbian art”. [23]
Ainsi, pour Peter Furst, l’Ololiuhqui et le Tlitliltzin, dans la vision des Peuples Méso-Américains, sont indissociables de la Déesse-Mère, de la Terre-Mère. Pourquoi? Parce que, tout simplement, ces plantes enthéogéniques permettent aux shamans de communiquer, directement, avec l’Entéléchie de ce monde – la Mère Animale Planétaire.
«Des relations symboliques, très élaborées, impliquant la Belle de Jour, la fécondité, le maïs et la Déesse-Mère, sont suggérées par Aguirre Beltran, en 1963, dans ses commentaires portant sur les influences de l’acculturation religieuse sur le complexe pré-hispanique Ololiuhqui au tout début de l’époque post-hispanique. Il attire l’attention sur les diverses appellations caractérisant la Belle de Jour sacrée durant les temps Aztèques et durant l’époque coloniale. L’une de ces dénominations était “Xoxouhqui” – signifiant le Serpent Vert. Une autre, mentionnée par Hernandez, était “[ololiuhqui] coaxihuitl” qui peut-être traduit par “[ololiuhqui] plante du serpent”. Ces termes – qui peuvent avoir été inspirés par le comportement rampant et volubile de la plante – nous rappellent le motif du serpent que l’on retrouve sur la peinture murale de Tepantitla. De plus, il est à noter que le nom de plusieurs divinités femelles Aztèques contiennent le terme “coatl”, signifiant “serpent”, et qu’il existait une identification précise entre les serpents et la Déesse-Mère. C’est, encore, le cas chez le Peuple Huichol.
Selon Ruiz de Alarcon, “cuezpalli” constitue un autre nom – qu’il évoque également comme “cuexpalzi” et “cuetzpalli”. L’orthographe correcte, ainsi qu’Aguirre Beltran le signale, est “cuetzpaltzin” ou “cuetzpallin” – à savoir le Lézard Sacré qui caractérise le 16ème jour dans le calendrier Aztèque de 20 jours. Cuetzpaltzin représentait l’abondance de l’eau, la fécondité et le plaisir sans la douleur. Il possédait, également, des connotations sexuelles: dans les manuscrits antiques, dans lesquels les symboles des jours sont corrélés à des parties du corps humain, le Lézard Sacré symbolise, parfois, le pénis et, parfois, l’utérus». [23]
Peter Furst évoque, également, la question d’Esther Pasztory très étonnée par le fait que la plupart des motifs floraux du site archéologique de Teotihuacan se ressemblent: «Devons-nous assumer que la plupart des représentations florales, à Teotihuacan, soient dérivées du narcotique Ololiuhqui, et de son culte, ou y fassent référence?»
Les divinités femelles Aztèques contenant le terme “coatl”, serpent, dans leur dénomination, sont, par exemple: “Coatlicue”, la Dame à la Jupe de Serpent; “Cihuacoatl”, la Femme Serpent, divinité de la Fertilité et de la Naissance; “Chicomecoatl”, Sept Serpents, la Déesse de la Nutrition. Il est vrai que le terme serpent entre tout aussi bien dans la composition des noms de divinités Aztèques mâles – tels que Quetzalcoatl, Mixcoatl, Xiuhcoatl, mais…
… toux ceux et celles qui ont communié au sacrement enthéogénique et extatique de l’Ayahuasca connaissent intimement – dans leur ADN et dans leur psyché – les relations synergétiques existant, dans la Médecine de l’Anaconda, entre la Terre-Mère, le Serpent, et les lianes de la plante dénommée “Yagé” – à savoir Banisteriopsis caapi de la Famille des Malpighiaceae.
Chez les Gnostiques Païens et chez les initiés Telestai d’antan, le Serpent est la Déesse de Sagesse – à savoir, Gaïa-Sophia. Je renvoie les lecteurs intéressés vers les trois essais de John Lamb Lash intitulés “Sophia est l’authentique Lucifer” – dans la rubrique “Mythophrénie en Action” de mon site Magie Tantrique Gaïenne. [24] [25] [26]
Les Fungi Epibiotiques des Convolvulacées: une Synergie Enthéogénique
Albert Hofmann, en 1961 et en 2006, ayant découvert la présence d’alcaloïdes à base d’ergoline, évoqua la possibilité que ces espèces puissent constituer des plantes-hôtes pour des champignons produisant ces alcaloïdes. Il fallut, cependant, attendre l’année 2011 pour que le genre Periglandula – de la Famille des Clavicipitacées – fût découvert avec seulement, alors, deux espèces identifiées: Periglandula ipomoeae, en synergie avec Ipomea repens, et Periglandula turbinae, en synergie avec Turbina corymbosa. [3]
Il est à noter que les alcaloïdes de type ergoline existent chez les champignons Ascomycètes – en particulier dans les genres Claviceps, Aspergillus et Penicillium – ainsi que dans deux familles botaniques – Convolvulacées et Polygalacées – et même chez un animal, un Tunicier du genre Eudistoma.
A ce jour, les espèces de Periglandula n’ont pas pu être cultivées en laboratoire: ces fungi n’existent qu’en synergie avec un certain nombre d’espèces dans quelques genres de la Famille des Convolvulacées.
Le nom Latin du genre “Periglandula” fait référence à l’observation selon laquelle les fungi de ce genre sont intimement associés avec les trichomes glandulaires peltés sur la surface adaxiale des feuilles de Convolvulacées. Ces trichomes glandulaires, et leurs métabolites spécifiques, constituent, ainsi, vraisemblablement, la base d’un dialogue métabolique entre les fungi et la plante qui les accueille. [37]
Certaines espèces de la Famille des Convolvulacées contiennent, ainsi, des alcaloïdes de type ergoline qui sont produits par le biais d’une synergie avec des fungi épibiotiques appartenant aux genres Claviceps et Periglandula. Ces fungi sont dénommés “épibionts” car leurs hyphes ne pénètrent pas dans les cellules d’épiderme, ou stomates, de leurs plantes-hôtes respectives. De plus, ils sont intimement associés avec les glandes sécrétoires situées à la surface des feuilles. Ils sont, uniquement, transmissibles au travers des semences de la plante – à savoir au travers d’une transmission verticale. [1] [2]
Dans une étude récente, publiée en 2018, Eckhard Leister évoquait le fait que «la viabilité du fungus vectorisé par la semence dépend de l’âge, de la conservation, du taux d’humidité et de la température de conservation de cette semence.» [37] Il est donc possible que la viabilité de la semence excède la viabilité du fungus. Cela signifie que de très vieilles semences d’Ipomées enthéogéniques pourraient avoir conservé leur capacité germinative tout en ayant perdu leur faculté enthéogénique.
Une étude, de 2014, a recherché la présence de fungi du genre Periglandula dans huit espèces de Convolvulacées contenant des alcaloïdes de type ergoline: à savoir, Argyreia nervosa, Ipomoea amnicola, Ipomoea argillicola, Ipomoea gracilis, Ipomoea hildebrandtii, Ipomoea leptophylla, Ipomoea muelleri et Ipomoea pes-caprae. Ces huit espèces de Convolvulacées se caractérisaient par quatre chémotypes différents – avec des concentrations variant de 15.8 à 3223.0 μg/g – constitués de 4 ou 5 alcaloïdes de type ergoline sur les 7 découverts dans ces espèces-hôtes. Les analyses phylogénétiques confirmèrent que ces fungi appartiennent à la Famille des Clavicipitacées et qu’ils forment un groupe monophylétique avec les deux espèces de Periglandula identifiées en 2011. Cette étude est la première à découvrir d’autres espèces de Periglandula dans des Convolvulacées nord-Américaines, Asiatiques, Africaines et Australiennes. Elle prouve, également, que, dans les Ipomées, la présence d’alcaloïdes de type ergoline est indissociable de la colonisation, de leurs jeunes feuilles, par des fungi symbiotiques du genre Periglandula. [5]
Une étude très récente, de 2019, a étudié les synergies entre Ipomoea tricolor, les champignons du genre Periglandula et le nématode Meloidogyne incognita – afin de déterminer les taux d’ergine, d’ergovine et de chanoclavine, générés par cette espèce d’Ipomée enthéogénique, et afin d’étudier le rôle de ces alcaloïdes dans les processus de défense de la plante. [35] [36]
Une étude ultérieure, de 2018, a étudié les relations existant entre les épibionts symbiotiques du genre Periglandula et la présence du Psylle de la pomme de terre (Bactericera cockerelli) sur 14 espèces de la Famille des Convolvulacées – appartenant à 4 genres: Convolvulus, Calystegia, Ipomoea et Turbina. Les fungi du genre Periglandula furent identifiés sur 11 espèces – y compris dans les genres Convolvulus et Calystegia où ils n’avaient jamais été découverts auparavant. Dans leurs tissus foliaires, 5 de ces 11 espèces contenaient de larges quantités d’alcaloïdes de type ergoline: des clavines et des amides d’acide lysergique. Les Psylles de la pomme de terre moururent très rapidement sur ces 5 espèces et ne survécurent, pour atteindre la maturité adulte, que dans 7 des 9 espèces de Convolvulacées ne contenant pas d’alcaloïdes de type ergoline. [4]
Il est très vraisemblable que toutes les espèces de Convolvulacées, contenant des alcaloïdes à base d’ergoline, accueillent des fungi du genre Periglandula. A ce jour ce sont au moins 23 espèces d’Ipomées qui se caractérisent par la présence de ces alcaloïdes ainsi que certaines espèces dans les genres Argyreia, Strictocardia et Turbina. Le genre Turbina contient une quinzaine d’espèces mais à ce jour, seules deux ont été validées contenant des alcaloïdes à base d’ergoline – à savoir Turbina corymbosa et Turbina abutiloides.
Le genre Periglandula appartient à la Famille des Clavicipitaceae dans l’Ordre des Hypocreales. Il est à noter que des fungi Ascomycètes très distants, et produisant des alcaloïdes, se retrouvent dans la Famille des Convolvulacées.
En effet, par exemple, l’Ipomée enthéogénique Ipomoea carna – utilisée par des Peuples Indigènes de l’Equateur – contient un alcaloïde indolizinique, la swainsonine, qui est produit par un fungus symbiotique de l’Ordre des Chaetothyriales. [38] [39] Elle est également produite par d’autres fungi tels que Slafractonia leguminicola et Metarhizium robertsii. La swainsonine possède des propriétés anti-carcinogéniques – en particulier, à l’encontre des cancers des poumons. [40]
Ipomoea carna – dénommée “matacabra” et “borachero” en Equateur – contient, également, des alcaloïdes tropanes (des calystégines) mais ils sont produits directement par la plante – car l’application de fongicides, sur cette espèce, inhibe, seulement, la production de l’alcaloïde swainsonine.
Selon l’équipe de chercheurs Allemands (Ulrike Steiner, Eckhard Leistner…) qui étudient, depuis une dizaine d’années, cette synergie entre les Convolvulacées et les fungi Periglandula:
«Le traitement des plantes avec des fongicides élimine à la fois le fungus et les alcaloïdes. En contraste, la production de sesquiterpènes n’en est pas affectée. Ainsi donc, l’élimination des fungi, et des alcaloïdes, constitue un processus spécifique qui n’affecte pas le métabolisme secondaire du symbiote, en général, mais, plus spécifiquement, le développement du fungus clavicipitacéen Periglandula producteur d’alcaloïdes. Il démontre, également, que les sesquiterpènes sont des produits de la plante et non pas du fungus. L’élimination simultanée du champignon et des alcaloïdes assigne la biosynthèse de ces alcaloïdes à base d’ergoline au fungus Periglandula. Cela s’accorde avec le fait que le jeu complet de gènes nécessaire à la synthèse de ces alcaloïdes est localisé dans le champignon.
La phase essentielle dans la biosynthèse des alcaloïdes s’effectue grâce à la prénylation du tryptophane avec du diméthylallyl-pyrophosphate catalysé par la 4-γ,γ-diméthylallyltryptophane synthase. Cette enzyme est encodée par le gène dmaW qui fait partie du cluster de gènes alcaloïdes de l’ergoline fongique au sein de Periglandula ipomoeae et de Periglandula turbinae. Le gène dmaW de Periglandula ipomoeae était sur-exprimé. La spécificité de substrat et les données kinétiques ne laissent aucun doute quant à son rôle dans la biosynthèse des alcaloïdes de l’ergoline. On peut, donc, en conclure que les alcaloïdes de l’ergoline, et potentiellement, également, leur biosynthèse, résident dans le fungus. D’autre part, il est généralement accepté que les alcaloïdes de l’ergoline – qui sont des constituants bien connus des fungi clavicipitacéens – confèrent , à leurs plantes-hôtes, une résilience environnementale, une adaptabilité, une activité insecticide et une protection à l’encontre des prédateurs. En fait, si les alcaloïdes de l’ergoline conféraient un bénéfice à la plante, ils devraient être localisés dans la plante et non pas dans le fungus. Un traitement ultrasonique des feuilles d’Ipomoea repens élimine le fungus et permet de réaliser une analyse séparée des deux organismes symbiotiques. Il démontre que 95% des alcaloïdes présents dans les feuilles symbiotiques résident dans l’organe de la plante et non pas dans les hyphes qui leurs sont associés.
Nous postulons, donc, que la biosynthèse des alcaloïdes de l’ergoline prend place dans le fungus et qu’un transfert de ces alcaloïdes se manifeste des hyphes des Periglandula vers les feuilles des plantes-hôtes – Ipomoea repens et Turbina corymbosa. C’est un fait intéressant dans la mesure où les hyphes fongiques sont connus pour être intimement associés avec les glandes peltées sécrétant des huiles volatiles à la surface des feuilles sans, apparemment, en pénétrer l’épiderme. Ainsi, il se peut que les trichomes glandulaires possèdent une fonction duelle car non seulement sécrètent-ils des huiles volatiles mais, de plus, ils absorbent et transportent, vraisemblablement, les alcaloïdes des hyphes fongiques vers les feuilles de la plante». In “The Key Role of Peltate Glandular Trichomes in Symbiota Comprising Clavicipitaceous Fungi of the Genus Periglandula and Their Host Plants”. [42] Traduction de Xochi.
Ainsi que Gordon Wasson posait la question, un jour: si certains alcaloïdes, dans les plantes enthéogéniques, n’ont pas réellement pour fonction automatique de protéger ces plantes qui les accueillent… quelle est donc leur fonction essentielle? Sont-ils là pour le bénéfice strict des animaux humains souhaitant communiquer avec le monde du Nagual – et communier avec la Terre-Mère?
Les Alcaloïdes dans la Famille des Convolvulacées
Voici quelques-uns des alcaloïdes à base d’ergoline que l’on retrouve dans la Famille des Convolvulacées: l’agroclavine, la chanoclavine, l’elymoclavine, l’ergine (LSA), l’erginine, l’ergocristine, l’ergotamine, l’ergométrine, l’ergosine, l’ergosinine, la festuclavine, le lysergol, la penniclavine, la sétoclavine, l’isosétoclavine, la molliclavine, la cycloclavine. Voici quelques-uns de leurs alcaloïdes indolizidiniques: l’ipabildine, la swainsonine et la 2-épi-lentiginosine. Leurs alcaloïdes tropanes sont les calystégines.
Une étude très récente, de 2019, a également mis en exergue la présence d’alcaloïdes indoliques diterpènes dans 8 espèces d’Ipomées: Ipomoea tricolor, Ipomoea repens, Ipomoea muelleri, Ipomoea amnicola, Ipomoea argillicola, Ipomoea gracilis, Ipomoea pes-caprae, Ipomoea setifera. Ainsi que dans deux espèces d’Argyreia: Argyreia acuta et Argyreia obtusifolia. Toutes ces 10 espèces contiennent, également, des alcaloïdes de l’ergoline.
Les alcaloïdes indoliques diterpènes analysés étaient au nombre de 41 (paspaline, terpendoles, émindole…) avec la paspaline présente dans les 10 espèces. D’un point de vue médicinal, la paspaline possède un potentiel thérapeutique à l’encontre de la Maladie d’Alzheimer.
L’Agroclavine possède des propriétés anti-microbiennes, anti-carcinogènes et anti-tumorales. Elle est présente dans Ipomoea tricolor, Ipomoea fistulosa et Ipomoea muelleri.
La Chanoclavine possède des propriétés psychomimétiques et psychotropiques. Elle est présente dans Ipomoea tricolor, Ipomoea hederacea, Ipomoea repens, Ipomoea violacea et Ipomoea muelleri.
Caveat: lorsque Ipomoea violacea est mentionnée, dans cette liste suivante, il est fortement possible qu’il s’agisse, en réalité, d’Ipomoea tricolor – de par la réitération de la même erreur botanique au fil de quelques dizaines d’années.
L’Elymoclavine possède des propriétés psychomimétiques et psychotropiques. Elle est présente dans Ipomoea violacea, Ipomoea hederacea, Ipomoea parasitica et Ipomoea muelleri.
L’Ergine – ou LSA – possède des propriétés psychomimétiques et psychotropiques. Elle est présente dans Ipomoea tricolor, Ipomoea repens, Ipomoea violacea et Ipomoea muelleri.
L’Erginine possède des propriétés psychomimétiques et psychotropiques. Elle est présente dans Ipomoea tricolor, Ipomoea violacea et Ipomoea muelleri.
L’Ergocristine possède des propriétés psychomimétiques et psychotropiques. Elle est présente dans Ipomoea tricolor.
L’Ergotamine possède des propriétés psychomimétiques, psychotropiques, vasoconstrictrices, anti-inflammatoires et stimulatrices de la sérotonine. Elle est présente dans Ipomoea tricolor.
L’Ergométrine possède des propriétés psychomimétiques, psychotropiques, utéro-toniques, vasoconstrictrices, hémostatiques, anti-inflammatoires et stimulatrices de la sérotonine. Elle est présente dans Ipomoea tricolor, Ipomoea violacea et Ipomoea muelleri.
L’Ergosinine possède des propriétés utéro-toniques. Elle est présente dans Ipomoea palmata.
La Festuclavine possède des propriétés anti-microbiennes. Elle est présente dans Ipomoea muelleri.
Le Lysergol possède des propriétés psychomimétiques et psychotropiques. Elle est présente dans Ipomoea violacea, Ipomoea hederacea, Ipomoea parasitica, Ipomoea petaloidea et Ipomoea muelleri.
La Penniclavine possède des propriétés psychotropiques. Elle est présente dans Ipomoea violacea, Ipomoea hederacea et Ipomoea muelleri.
L’Ipalbidine possède des propriétés analgésiques et anti-oxydantes. Elle est présente dans Ipomoea alba, Ipomoea muricata et Ipomoea hardwickii.
La 2-épi-lentiginosine possède des propriétés anti-carcinogéniques de par sa puissante inhibition de l’α-mannosidase. Elle est présente dans Ipomoea carnea.
La Swainsonine possède des propriétés anti-métastatiques, immuno-modulatrices et anti-carcinogéniques de par sa puissante inhibition de l’α-mannosidase. Elle est présente dans Ipomoea carnea.
Les Calystégines possèdent des propriétés puissantes d’inhibition de l’α-mannosidase, de la β-mannosidase et de la β-glucosidase. Elles sont présentes dans Ipomoea alba, Ipomoea aquatica, Ipomoea batatas, Ipomoea carnea, Ipomoea hederifolia, Ipomoea eremnobrocha, Ipomoea obscura, Ipomoea pes-caprae, Ipomoea setifera, Ipomoea violacea.
Des investigations pharmacologiques récentes ont mis en exergue l’activité thérapeutique de certains alcaloïdes à base d’ergovine à l’encontre de souches de cancer ou de tumeurs. C’est le cas de l’agroclavine, de l’ergosterol, de l’ergocornine E, de l’ergotamine, de la dihydroergocristine et du 1-propyl-agroclavine tartrate.
Ainsi, par exemple, selon l’ouvrage “Cancer Inhibitors from Chinese Natural Medicines”, le 1-propyl-agroclavine tartrate est, particulièrement, actif à l’encontre de tumeurs et des cancers des ovaires, de la peau, du cerveau, des poumons, des reins et du colon. [44] [45]
Xochi. Le 21 février de l’An 03 des Gilets Jaunes